Luisa Miller
Giuseppe Verdi
Mélodrame tragique en trois actes de Salvatore Cammarano,
tiré du drame Kabale und Liebe de Friedrich Schiller
Maître de concert et chef d'orchestre
ROBERTO ABBADO
Réalisation
LEV DODIN
Scènes et Costumes
ALEKSANDR BOROVSKIJ
Lumières
DAMIR ISMAGILOV
Assistant réalisateur
DMITRIJ KOŠMIN
Dramaturgie
DINA Dodina
ORCHESTRE ET CHOEUR DU THÉÂTRE MUNICIPAL DE BOLOGNA
Chef de choeur ALBERTO MALAZZI
Personnages |
Interprètes |
Le comte de Walter |
RICCARDO ZANELLATO |
Rodolfo |
AMADI LAGHA |
Federica |
MARTINA BELLI |
Wurm |
GABRIELE SAGONA |
minotier |
FRANCO VASSALLO |
Luisa |
FRANCESCA DOTTO |
Laura |
VETA PILIPENKO |
Un contandino |
FEDERICO VELTRI |
Quelle meilleure description donner de Luisa Miller que celle qui se dessine dans une
lettre adressée par Verdi à son librettiste, Salvatore Cammarano ? Le maestro y exprime le souhait de répondre à la commande du Teatro San Carlo de Naples en composant un ouvrage dominé par
« des caractères bien dessinés, de la passion, du mouvement ».
Le choix de Verdi se porte sur une pièce de Schiller dont l’intrigue répond à ses aspirations artistiques tout en faisant écho aux changements qui viennent d’intervenir dans sa vie personnelle.
Récemment installé dans sa ville natale de Busseto, le compositeur écrit son quatorzième ouvrage dans le contexte né des luttes engagées contre l’occupant autrichien. Verdi commence une nouvelle
vie entourée d’un parfum de scandale dans la petite société provinciale qui rejette sa compagne, Giuseppina Streponni. Le combat contre un ordre social et politique hostile passe du réel à
l’imaginaire pour donner naissance à une tragédie intime située au cœur d’un paisible village tyrolien, comme un écho de la vie du Busseto retrouvé. En participant activement à l’élaboration du
livret, Verdi cherche à privilégier les situations conflictuelles propres à exacerber les passions individuelles dans un cadre intime. Après les années dites « de galère » durant
lesquelles le maestro a dû travailler sans relâche, une nouvelle période semble s’annoncer. S’éloignant de l’atmosphère grandiose et passionnée du style « risorgimental » dans lequel
les personnages apparaissent comme les porte-paroles d’un groupe ou d’une nation, Verdi expérimente les ressources dramatiques et expressives de la sphère intime qui le conduiront vers la future
trilogie : Rigoletto, Le Trouvère et La Traviata.
Résumé
Dans un village du Tyrol, au XVIIème siècle, Luisa, fille du vieux soldat Miller, et Rodolfo, fils du comte Walter, s’aiment d’un amour impossible. Le comte règne avec dureté sur la région. Il entend bien marier son fils à la duchesse Federica. Mais Rodolphe fait le serment d’épouser Luisa et menace son père de révéler qu’il a assassiné son propre cousin pour usurper ses titres et son pouvoir. Quand Miller est arrêté pour offense à son seigneur, Wurm, l’intendant du comte, propose à Luisa, dont il est amoureux, de sauver son père. Elle se laisse convaincre d’écrire un billet dans lequel elle avoue être amoureuse de Wurm et avoir séduit Rodolfo par intérêt. La lecture de ce billet plonge Rodolfo dans le désespoir. Il accepte d’épouser Federica, mais quitte la cérémonie pour rejoindre Luisa et s’assurer définitivement de sa trahison. Rodolfo prépare une coupe empoisonnée pour lui et la jeune fille . Sur le point de succomber au poison, Luisa lui avoue son sacrifice. Désespéré, il a le temps de transpercer Wurm de son épée, avant de la rejoindre dans la mort.
Avis du président de l'association sur ce spectacle :
Premier opéra de cet agréable et émouvant séjour à Parme, sur les pas de Verdi, le samedi 19 octobre 2019 à 20h. Non pas au Teatro Regio mais dans un lieu particulier du Centro storico, à savoir la grande église San Francesco al Prato actuellement en cours de restauration. Sera-t-elle consacrée à nouveau ou sera-t-elle transformée en équipement culturel ? Pour l’instant, elle disparaît dans une forêt d’échafaudages tant extérieurs qu’intérieurs !
Le grandiose Teatro Farnese du Palazzo della Pilotta, autrefois utilisé par le Festival Verdi, étant récemment interdit à toutes représentations pour des raisons de sécurité, la direction a dû se rabattre sur cette vaste église attenante au couvent franciscain.
A priori, pourquoi pas ? L’architecture chargée d’histoire pouvait se prêter à recevoir une manifestation prestigieuse.
Quel ne fut pas notre étonnement lors de l’installation à nos places retenues en 1ère série : des structures tubulaires chargées de passerelles de chantier partout !!! Sur tous les murs et les colonnes, et jusqu’au plafond, invisible !
Au milieu de ce qui reste de la nef, une cinquantaine de rangées de fauteuils alignés, sans quinconce, sur un sol interminable et quasi plat ! Pas de gradins !
A moins d’être placé dans les 10 à 15 premiers rangs au maximum, la visibilité s’avéra plutôt restreinte dans un tel "couloir" ; la scène, au-delà de la fosse occupant le transept, paraissant lointaine et exigüe, coincée entre les échafaudages du chœur.
De plus, à mi chemin, une plate forme surmontait une partie des rangées, plate forme destinée aux personnalités VIP installées sur des gradins ! Vous dire que les malheureux spectateurs situés au-dessous et à fortiori au-delà n’ont pas dû voir grand-chose, ni entendre correctement ! Même pas un second écran de surtitrage pour eux !
Tout ceci pour un tarif de 230€ !!! Et assis sur des fauteuils pas vraiment confortables, raides. Proprement scandaleux !!!
Comment la direction du Festival a-t-elle pu concevoir et accepter un pareil dispositif totalement inadapté et aberrant ?
Comment le bon sens évident d’édifier des rangées en gradins inclinés offrant une bien meilleure visibilité, avec des fauteuils un peu plus étoffés, a-t-il pu échapper à ces organisateurs aussi professionnels ?
Nous leur ferons savoir notre désarroi et notre désappointement, voire notre colère, par courrier. Il serait judicieux qu’ils soient interpelés publiquement sur ce ratage complet !
La rumeur courait déjà parmi le public qu’une partie du montant élevé des billets pourrait servir à restaurer l’édifice : pourquoi pas, mais alors il aurait fallu jouer la transparence en avertissant les spectateurs.
D’après le pré-programme du prochain Festival Verdi en 2020, des représentations de "Macbeth" sont à nouveau prévues au même endroit.
Passé cette stupéfaction et ces désagréments, fort heureusement la qualité musicale emporta l’adhésion de toutes et tous !
Acoustique honorable (jusqu’au milieu environ, ensuite ?) qui nous a cependant permis d’apprécier l’excellence générale des interprètes de ce "Luisa Miller" si rarement donné sur scène.
- Sur scène : un décor minimum ! Quelques éléments de bois (planches) disposés de part et d’autre du plateau en 2 galeries exigües entourant le chœur, où se placeront les choristes assis ou debout mais qui ne bougeront plus.
Au centre, un plateau vide habité au fur et à mesure de l’intrigue par des tréteaux et des panneaux formant une immense table, face public, sur laquelle évolueront certains personnages (dont Luisa) puis seront disposés divers accessoires, comme des chandeliers formant une assez belle image finale de banquet. Sauf que la vision frontale éloignée ne nous permettait pas de distinguer l’effet de perspective voulu par le metteur en scène russe, Lev Dodin, qui a du faire avec l’absence totale de machinerie et l’étroitesse du plateau. D’où un travail très statique où les protagonistes se contentaient d’entrer et sortir (difficilement à cause des tubulures !) et de monter ou descendre de la table !
Au moins Lev Dodin aurait-il pu insister sur un travail de jeu scénique bien plus approfondi avec les chanteurs dont la plupart semblaient plantés sur scène !!!! Et puis, quelle idée saugrenue de faire chanter Luisa et Rodolfo assis face à face en bout de table pendant leur long duo final si dramatique ? Les pauvres ne savaient plus comment bouger !!
En conclusion, un ensemble correct que l’on oubliait vite grâce à la beauté musicale.
- Côté interprètes : dans cet écrin difficile si particulier, les chanteurs firent le maximum en offrant du beau chant !
. Notamment, l’ample et chaude voix du baryton Franco Vassallo, vétéran du répertoire, en père noble et vertueux de l’héroïne, mais un peu empêtré sur scène, à la ligne de chant puissante, pouvant manquer parfois de nuances.
. Sa fille Luisa, toute de blanc vêtue, fut incarnée par la belle soprano sensible Francesca Dotto tout à fait impliquée dans son rôle.
. A leur côté, deux basses plus en retrait, plus éteintes, celles de Riccardo Zanellato en Walter tourmenté, et celle de Gabriele Sagona en Wurm, l’âme noire par laquelle le drame se noue, très statique, voire "placide" (un contresens !!).
. La révélation fut un jeune ténor franco tunisien, Amadi Lagha, au timbre lumineux, chaleureux, bien projeté, mais encore incertain au début puis mieux affirmé. La voix peut encore gagner en maîtrise, en expérience. A suivre….
. Un beau contralto en l’élégante personne de Martina Belli, la Duchesse rivale de Lucia, ainsi qu’une belle mezzo en la jeune servante Laura chantée par Veta Pilipenko.
Malgré les petites réserves évoquées, l’ensemble du "cast" fut de fort bonne tenue ! "Bravi" à eux tous de chanter dans de telles conditions !
. Bravo également aux choristes du Teatro Comunale di Bologna, si peu visibles, mais qui n’ont pas démérité.
- Côté fosse : l’orchestre du Teatro Comunale di Bologna, bonne phalange renommée (et à l’aise dans ce répertoire), souple et chaleureuse menée fermement par la baguette du Maestro Roberto Abbado (neveu du grand Claudio !) qui s’avéra bon chef d’opéra en insufflant vie et dynamisme dans la partition.
"Bravi" aussi à eux tous pour cette belle prestation musicale dans des circonstances difficiles, du moins si peu adaptées.
Nos Amis ont vite oublié les désagréments au profit d’une belle incarnation de la musique du grand Verdi.
Gageons que la direction du Festival Verdi recevra quelques volées de bois vert pour l’amener à rectifier le tir l’année prochaine : un vrai gradin au moins serait le bienvenu !! Ou un autre lieu ?
Viva Verdi !!
Alain GUIPONT
Nabucco
Giuseppe Verdi
Drame lyrique en quatre tableaux
Livret de Temistocle Solera,
d'après Nabuchodonosor d'Auguste Anicet-Bourgeois et Francis Cornu
et le ballet Nabuccodonosor d'Antonio Cortesi
Maître de concert et directeur
FRANCESCO IVAN CIAMPA
Projet de création
RICCI / FORTE
Réalisé par
STEFANO RICCI
NICOLAS BOVEY scènes
Costumes
GIANLUCA SBICCA
Lumières
ALESSANDRO CARLETTI
Chorégraphies
MARTA BEVILACQUA
FILARMONICA ARTURO TOSCANINI
ORCHESTRE DE LA JEUNESSE DE LA VIA EMILIA
CHŒUR DU THÉÂTRE REGIO DI PARMA
Personnages |
Interprètes |
Nabucco |
AMARTUVSHIN ENKHBAT |
Ismaël |
IVAN MAGRÌ |
Zaccaria |
RUBÉN AMORETTI |
Abigaille |
SAIOA HERNÁNDEZ |
Fenena |
ANNALISA STROPPA |
Le Grand Prêtre de Belo |
GIANLUCA BREDA |
Abdallo |
MANUEL PIERATTELLI |
Anna |
ELISABETTA ZIZZO |
Nabucco (initialement appelé Nabuccodonosor) est un opéra en 4 actes du compositeur romantique italien Giuseppe Verdi (1813-1901), créé en 1841 suite à une commande de la Scala de Milan. Le livret, écrit par Temistocle Solera (1815-1878) d'après le drame en quatre actes de l'auteur dramatique français Auguste Anicet-Bourgeois Nabuccodonosor (1836), évoque l'épisode biblique de l'esclavage des juifs à Babylone décrit dans les livres de Jérémie et de Daniel (Ancien Testament).
La création de cet opéra – et a fortiori le lancement de la carrière de Verdi – a été permise par la persévérance de l'imprésario de la Scala, Bartolomeo Merelli. En 1838, après le succès du premier opéra du compositeur intitulé Oberto, Merelli commande au jeune Verdi deux autres opéras. Le compositeur se lance alors dans l'écriture d'une œuvre comique Un giorno di regno. Mais la perte de sa femme et de ses deux enfants en l'espace de deux années entrave son travail entraînant une création ratée en 1840. Ces drames familiaux successifs et son humiliation professionnelle font jurer à Verdi de ne plus jamais rien écrire et il décide de mettre fin à sa carrière de compositeur avant même qu'elle n'ait commencée. Mais Merelli, au détour d'une rencontre fortuite près de la Scala au début de l'année 1841, lui fait parvenir le livret de Solera et le convainc de faire une dernière tentative de composition d'un opéra. L'insistance de Merelli pousse Verdi à reconsidérer sa décision, et il se met à composer la musique de Nabuccodonosor.
L'opéra, créé le 9 mars 1842 à la Scala de Milan, a un succès colossal auprès du public (à tel point qu'il éclipse totalement les opéras de ses contemporains comme Donizetti), notamment à cause des aspirations révolutionnaires que cette œuvre véhicule et qui trouvent une résonance dans le public lombardien alors sous contrôle autrichien. L'accueil des critiques est en revanche plus réservé, car dans Nabucco, Verdi rompt totalement avec les principes du genre et propose un nouveau type d'opéra italien. Cela n'empêche pas sa création dans de nombreux théâtres italiens et européens (notamment à La Fenice de Venise) dès la fin de l'année 1842. Le changement de nom pour Nabucco s'opère lors de sa création au théâtre San Giacomo de Corfu en septembre 1844.
Résumé
L’action se déroule à Jérusalem et à Babylone en 586 avant Jésus-Christ. Nabucco, roi de Babylone, a triomphé des Hébreux. Zaccaria, leur grand prêtre, menace de tuer Fenena, fille de Nabucco, s’il ne renonce pas à ses menaces impies ; Fenena aime par ailleurs Ismaël, neveu du roi de Jérusalem. Seule la foudre divine semble stopper Nabucco qui, en osant se proclamer l’égal de Dieux, tombe terrassé : l’esclave Abigaille, persuadée jusque là d’être la fille légitime du roi, profite immédiatement de la situation pour lui ravir sa couronne, s’emparer du pouvoir et l’emprisonner. Eprise elle aussi d’Ismaël, Abigaille condamne Fenena au supplice. Depuis sa cellule, Nabucco prie le Dieu des Juifs ; il sera finalement libéré par ses hommes et interviendra juste à temps pour empêcher l’irréparable, sauvant sa fille Fenena et libérant les Hébreux opprimés. Abigaille périt empoisonnée, non sans avoir imploré le pardon pour ses crimes et béni l’union d’Ismaël et Fenena.
Représentation de Nabucco vue par le président de l'association des "Amis de l'Opéra Grenoble" :
Seconde représentation d’opéra de notre beau séjour parmesan avec le célébrissime "Nabucco" le dimanche 20 octobre 2019, à 15h30, au très cossu Teatro Regio !
Changement total d’atmosphère ! Fi des échafaudages de la veille ! Place aux ors et velours d’un vrai théâtre à l’italienne !
Le Teatro Regio di Parma, à l’austère façade, offre une salle ample, fort élégante, très harmonieuse et assez solennelle. Royale mais chaleureuse, aux tonalités ivoire, rouge et or très classiques, assortie d’un plafond peint évoquant des cieux azurés où volent des anges, orné d’un beau lustre flamboyant. Quatre rangées de loges et une galerie entourent un parterre de velours rouge ouvrant sur une vaste cage de scène par delà la fosse d’orchestre. Très bon rapport salle-scène pour une jauge généreuse de 1400 places !
Certes, beaucoup de charme, de séduction, mais le confort n’est pas partout garanti dans les loges de côté où nous étions installés.
Va pour les places de devant mais, en arrière, il nous a fallu rester debout pour bénéficier d’une vision correcte sur le plateau.
Mais quelle ambiance ! Et quelle acoustique généreuse ! Surtout avec pareille vue plongeante sur la scène mais aussi sur la fosse où nous avons pu profiter de l’excellent travail de direction du jeune Maestro Francesco Ivan Ciampa.
Que dire de la mise en scène proposée par Stefano Ricci ? Rien de scandaleux ni de hors sujet. Mais rien de sensationnel non plus dans sa transposition de l’intrigue sur un navire militaire moderne, dirigé par un pouvoir totalitaire, accueillant des migrants naufragés pour mieux les conditionner et exploiter ensuite. Parti pris engagé en liaison avec l’actualité particulière de Italie, à l’avant poste des problèmes migratoires. Pourquoi pas ? Mais alors, pour en faire quoi après ?
Eh bien, une vision très convenue et mille fois vue d’une société totalitaire dominée par la figure classique du despote bien visible sur un écran de télévision. Agitation des soldats avec mitraillettes et rangers, scènes de foule bousculée, en gilets de sauvetage, maltraitée, triée, sélectionnée, etc ….. Un peu lassant car ça bouge partout ! Et d’un "réalisme" très convenu.
Enfin les choses se calmèrent avec un déroulement plus intimiste de l’intrigue procurant parfois d’assez belles visions, construites, fort bien éclairées. Ceci mené avec une honnête direction d’acteurs en général.
La seconde partie emporta plus l’adhésion de nos Amis grâce à une construction plus dramatique, centrée sur le rapport père-fille, Nabucco – Abigaille, où cette dernière avide de pouvoir, usant des techniques modernes de propagande, va destituer son père et prendre le pouvoir. Le despote change de visage sur l’écran.
Tout le monde attendait l’instant privilégié du "Va pensiero", oh combien entendu ! Il fut magnifiquement interprété (et bissé) par le Chœur du Teatro Regio, disposé parmi des œuvres d’art (dont le Moïse de Michel-Ange, clin d’œil au libérateur biblique des Hébreux) empaquetées (volées, déplacées ? Nous ne saurons pas !), nimbé d’une belle lumière douce et chaude. Beau moment musical !
Mais l’intention du metteur en scène semblait partir un peu dans diverses directions (despotisme, migrants, oppression, rôle de l’art, rapport de pouvoir, relation père-fille, jalousie entre sœurs, manipulations, propagande, terrorisme, etc…) brouillant sans doute une homogénéité de point de vue. Trop vouloir dire ? Sans doute ! Ne sommes nous pas capables de voir au-delà de la musique tous ces sous entendus sans que l’on nous les pointe du doigt avec insistance ? Vaste débat !
Final surprenant avec une scène de pendaison faisant référence autant aux exactions totalitaires qu’au fanatisme religieux (là aussi référence voulue ( ?) au terrorisme ou à l’exécution de Sadam Hussein ???). Ce serait plutôt la propre condamnation de la fille assoiffée de pouvoir qui trouve rémission dans la nouvelle croyance prêchée par le peuple soumis puis libéré.
Il est vrai que le livret original de l’opéra de Verdi fait preuve de certaines incohérences et évoque aussi diverses références tant bibliques que politiques, pas forcément en phase. Le public d’alors avait bien saisi certaines de ses références en s’identifiant au peuple italien sous le joug autrichien, et clamant sa douleur dans un sublime chorus devenu légendaire !
Le propos scénique, heureusement, a respecté l’intrigue sans la violenter, ni la déformer, voire la transformer comme se le permettent certains metteurs en scène trop "démiurges".
Bref, travail d’ensemble honorable même si inégal, parfois trop convenu, puis mieux assuré et qui, en fin de compte, trouva un écho favorable auprès des Amis !
Mais, là aussi, comme pour Luisa Miller, et même encore mieux : une superbe qualité musicale, magnifiée par cette acoustique incomparable propre à ces salles historiques. Mal assis mais quelle écoute !
- Côté chanteurs :
. Un Nabucco solide, impressionnant, à la voix ample, sonore, chaude, celle du baryton Amartuvshin Enkhbat, salué par la critique.
Stature imposante, parfois un peu statique. Voix à affiner avec plus de nuances.
. Sa fille, au registre diaboliquement difficile, aux intervalles quasi vertigineux, fut incarnée par la soprano Saioa Hernandez, très crédible scéniquement dans sa sophistication d’arriviste fortunée et ambitieuse. Voix solide, avec éclat, parfois un peu tendue et acide dans les aigus.
. Sa rivale, la véritable fille du roi, la sensible Fenena, fut incarnée par la chaleureuse mezzo-soprano Analisa Stroppa, fine musicienne.
. A son côté :
- Son amoureux tenu un peu trop en retrait, Ismaël, incarné par le valeureux ténor Ivan Magri, très assuré vocalement.
- Le grand Prêtre, en tenue stricte de clergyman moderne, incarné par la basse Ruben Amoretti, à la fois autoritaire et humain, occupant le rôle fort délicat d’intermédiaire entre le despote et le peuple.
- Chœur du Regio impeccable de musicalité et de présence !
Belle équipe d’interprètes talentueuse et homogène.
- Dans la fosse :
Le Filarmonia Arturo Toscanini, phalange elle aussi talentueuse et très respectueuse de l’orchestration verdienne encore emplie d’échos batailleurs juvéniles, mais vite dépassés par la maîtrise absolue des ensembles, annonciatrice des chefs d’œuvre qui vont suivre. Quelle musique !
Celle du premier Verdi donc, évidente, spontanée, emportant l’adhésion à condition de la prendre telle qu’elle est, sans préjugé, en se laissant porter par la vague, tout simplement.
Ce Nabucco n’a pas marqué l’histoire de l’opéra pour rien ! La preuve en fut bien évidente ce soir d’octobre au Teatro Regio di Parma, quasi chez le Maestro !
Un très grand salut au remarquable travail de direction d’orchestre de Francesco Ivan Ciampa véritable chef de théâtre d’opéra, attentif à la cohésion et à la tension dramatique, tant de la partition que de l’intrigue, portant à bout de bras ses interprètes afin de faire ressortir toute la palette des nuances de l’écriture musicale de Verdi. Éclat, vaillances, romantisme, douceur, mélancolie, colère, et nostalgie douloureuse (Va pensiero !), le tout sans relâcher la tension ! Bravissimo a tutti !
Bel ouvrage fort ovationné par le public fervent du théâtre, en partie italien mais aussi international d’aficionados du genre lyrique, dont nous sommes.
Un Nabucco modernisé, qui a déçu certains de nos Amis, partagés, espérant une vision plus classique de cette œuvre tellement marquée, mais qui nous laissa malgré tout sans regret tant cette musique emblématique balaya nos réserves.
Viva Verdi, per sempre !
Alain GUIPONT
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