Carmen
Georges Bizet
Opéra en quatre actes
sur un livret d’Henri Meilhac et Ludovic Halévy
créé le 3 mars 1875 à l’Opéra-Comique (Paris)
Andrea Molino Direction musicale
Jean-Louis Grinda Mise en scène
Rudy Sabounghi Décors
Rudy Sabounghi, Françoise Raybaud Pace Costumes
Laurent Castaingt Lumières
Gabriel Grinda Vidéo
Clémentine Margaine Carmen
Charles Castronovo Don José
Dimitry Ivashchenko Escamillo
Anaïs Constans Micaëla
Charlotte Despaux Frasquita
Marion Lebègue Mercédès
Christian Tréguier Zuniga
Anas Seguin Moralès
Olivier Grand Le Dancaïre
Luca Lombardo Le Remendado
Frank T’Hézan Lilas Pastia
Orchestre national du Capitole
Chœur et Maîtrise du Capitole
Alfonso Caiani Direction
A Séville en Espagne, Carmen, une jeune bohémienne rebelle et séductrice, déclenche une bagarre dans la manufacture de tabac où elle travaille. Elle se fait arrêter. Le brigadier Don José, chargé de la mener en prison, tombe sous son charme et la laisse s’échapper. Par amour pour elle, il va déserter et rejoindre les contrebandiers. Mais Carmen très vite va se lasser de lui et se laisser séduire par un célèbre torero. Don José, fou de désespoir et dévoré par la jalousie, la frappe à mort avec un poignard.
Alors que Du Locle et Leuven, directeurs de l’Opéra-Comique, commandent en 1872 une oeuvre nouvelle à Bizet, le composteur propose immédiatement Carmen. Le premier directeur se montre peu enthousiaste au projet, quand le second trouve impensable de programmer salle Favart une oeuvre dont le rôle-titre puisse être assassiné en scène ! Pour que Carmen voie le jour, Bizet devra ainsi promettre d’accentuer la couleur et l’énergie du drame tout en estompant ses traits les plus sombres. Mais malgré l’ajout d’une Micaëla, figure féminine douce et romantique, et le passage sous silence de la prostitution de Carmen, la bohémienne mourra bel et bien en scène le soir de la création, déclenchant la plus vive incompréhension et du même coup la plus féroce critique. Près de 150 ans plus tard, Carmen est sans nul conteste l’oeuvre la plus universellement admirée et jouée, un succès que Bizet, mort exactement trois mois après la création, n’aura pas connu. Pour son retour au Capitole, ce chef-d’oeuvre du répertoire français méritait une nouvelle production et une distribution d’exception. Voilà chose faite avec la mise en scène de Jean-Louis Grinda et une pléiade de chanteurs de renommée mondiale.
Horizons Russes
Chostakovitch et Tchaïkovski
STANISLAV KOCHANOVSKY Direction
SERGEY KHACHATRYAN Violon
CHOSTAKOVITCH
CONCERTO POUR VIOLON ET ORCHESTRE N° 1 EN LA MINEUR, OP. 77
TCHAÏKOVSKI
MANFRED, OP. 58
Les portraits croisés de Tchaïkovski et de Chostakovitch connaissent une nouvelle déclinaison sous l’archet de Sergey Khachatryan. Le violoniste arménien revient au Concerto n°1 de Chostakovitch, rappelant ainsi l’amour du compositeur soviétique pour la tradition concertante de son pays. Porté par des interprètes d’exception, l’Orchestre national du Capitole poursuit son exploration des deux figures majeures de la musique russe, marginalisées autant que révérées.
Les commentaires du Président de l'Association des Amis de l'Opéra Grenoble sur ce séjour :
Nouvelle découverte pour les Amis de l’Opéra-Grenoble en ce mois d’avril 2018 : la "Ville rose" !
Toulouse, où nous avons passé un superbe séjour du mercredi 18 au samedi 21, sous un chaud soleil de printemps, tempéré par un vent d’autan bienvenu en journée mais un peu frisquet en soirée.
Confortablement installés à l’hôtel Mercure centre Saint Georges, au cœur de la vieille ville, les Amis purent trinquer au champagne sur la terrasse de l’hôtel en toute convivialité avant de déguster un excellent dîner, en salon privé, le soir de notre arrivée. Deux moments de rencontres et d’échanges importants pour la vie de l’association. Nous avons fort apprécié la qualité d’accueil et de prestation du personnel de l’hôtel.
Ensuite, au programme, visites libres de la ville au patrimoine architectural de qualité. Multiples monuments religieux de grande importance et de renommée prestigieuse avec, entre autres, le grandiose étagement de la basilique Saint Sernin, plus vaste église romane d’Europe, et l’élégante et surprenante élévation des Jacobins, chef-d’œuvre unique en son genre.
Mais également des musées d’importance avec l’imposant Couvent des Augustins et l’Hôtel d’ Assézat, bijou renaissance.
Mais aussi, flânerie sur la légendaire Place du Capitole, cœur battant de la ville et dans les ruelles sympathiques et bourdonnantes d’activités !
Première émotion musicale, le jeudi 19 au soir, avec la représentation de l’éternelle "Carmen" de Georges Bizet au Théâtre du Capitole. Salle à l’italienne confortable, au rapport public – scène très équilibré, mais qui a subi de multiples transformations depuis sa création, y compris des incendies, lui faisant perdre en partie son caractère originel.
Bien installés au balcon central, bénéficiant d’une vision et d’une acoustique parfaites, nous avons pu vivre une Carmen mémorable, enflammée, passionnée, et tragique dans une mise en scène de Jean-Louis Grinda (Directeur de l’Opéra de Monte Carlo). Mise en scène classique, sans transposition malencontreuse, mais intelligemment construite offrant un déroulement limpide de l’intrigue.
Décor simple de grands murs de briques, évoquant la manufacture de tabac, enserrant le plateau sur lequel évoluent deux grandes structures brunes semi-circulaires, concaves, permettant par leur mobilité de fluidifier les changements de lieux, les placements des personnages et du chœur. Beaucoup de monde dans des costumes d’époque chatoyants mais jamais "pittoresques".
Tout à la fois murs, enceintes de l’arène, et mâchoires enfermant toujours plus les deux protagonistes principaux jusqu’à l’arène fatale du drame final, où Carmen se débat comme un papillon pris au piège sachant son issue impossible et affrontant la mort comme le taureau face au torero. Elle succombe au coup de poignard d’un Don José ravagé par un amour exclusif et possessif mais tout aussi destructeur. Meurtre présenté d’emblée en ouverture d’opéra comme si toute l’intrigue suivante n’était qu’un souvenir, qu’un "flash-back" comme au cinéma.
Ce dispositif scénique très simple mais suggestif a cependant perturbé certains de nos Amis par sa trop grande présence, toujours en mouvement, gênant l’action avec son aspect massif trop abstrait.
Mais le remarquable travail de jeu dramatique des chanteurs-comédiens de Jean-Louis Grinda est à saluer : parfaite lisibilité du drame et engagement sincère et crédible des interprètes. Au service d’une musique envoûtante de Bizet alliant fête et tragédie implacable. Aucune complaisance pour un pittoresque illustratif de pacotille ni de folklore suranné mais une profonde vérité des sentiments et du drame humain. Bravo à tous les interprètes !
Côté interprètes justement, un "cast" très homogène de haut niveau musical.
Tout d’abord avec une Carmen explosive, rauque, sensuelle certes mais plutôt femme déterminée que volage, encore jeune et farouche mais déjà fort lucide sur le caractère humain, celui des hommes entre autres, et avide de liberté.
Tout le contraire d’une femme diabolique et ravageuse, incarnée par la jeune mezzo-soprano française Clémentine Margaine qui a déjà triomphé dans ce rôle sur les scènes internationales. Voix ample, chaude, affirmée, assurée jusqu’à la fin du drame dans un rôle très lourd et contrasté. Visiblement épuisée au salut, elle fut très ovationnée (avec raison) !
Face à elle, le Don José du ténor américain Charles Castronovo : homme plutôt fragile et vulnérable mais sincère et émouvant avant de succomber dans les mailles du piège diabolique de la jalousie, rongé d’un amour passionnel et insensé le dépassant au point de briser les liens traditionnels auxquels il est très attaché et que lui rappelle la douce Micaëla. Il finira meurtrier et détruit, ayant tout perdu. Belle voix légère et sensible à la diction appliquée. Incarnation tout en nuances et musicalité, sans emphase grandiloquente souvent associée au rôle. Peut-être manquant parfois d’affirmation ?
A son côté, la jeune femme au cœur pur qui fera tout pour l’empêcher de succomber à sa folie amoureuse, mais sans succès, la tendre Micaëla déterminée à sauver son amour en bravant le milieu dangereux des contrebandiers. Pas de mièvrerie dans le beau chant de la soprano Anaïs Constans, irréprochable de sensibilité.
Un Escamillo enfin de bonne tenue, à la fois crédible physiquement et vocalement dans un rôle si galvaudé, parfois caricatural, en la personne du baryton russe Dimitry Ivashchenko à la voix chaude. Belle diction du français également.
Un grand bravo à tous les "comprimari", seconds rôles importants : militaires et cigarières, contrebandiers et autres, dont la présence essentielle brosse une galerie de personnages fort bien caractérisées vocalement.
Un autre grand bravo au Chœur du Théâtre du Capitole, homogène et de belle musicalité.
L’ensemble sous la baguette rigoureuse du maestro Andrea Molino à la tête du bel Orchestre national du Capitole, sachant illuminer la partition de toutes ses richesses harmoniques et rythmiques. Fulgurance, colère, passion mais aussi tendresse et mélancolie, voire nostalgie et mystère.
Belle et chaleureuse ovation du public toulousain !
Une Carmen qui restera dans nos cœurs !
Le lendemain soir, vendredi 20, autre découverte et changement complet d’atmosphère avec un concert symphonique de l’Orchestre National du capitole de Toulouse (ONCT), porté pendant 30 ans au meilleur niveau musical par son chef le plus connu, Michel Plasson, grand serviteur de la musique française.
Mais cette fois-ci il s’agissait de musique russe avec le concerto pour violon n° 1 de Chostakovitch et le poème symphonique Manfred de Tchaikovski.
Installés dans les tribunes latérales à l’étage, bénéficiant d’une belle vue d’ensemble de l’orchestre et surtout de l’ acoustique irréprochable de cette salle de concert si particulière de la Halle aux Grains. Autrefois ancien marché aux grains proche du canal du Midi, celui-ci devint dès les années cinquante un lieu de spectacles en tous genres, concerts populaires, variétés et même combats de boxe. En 1980, sous l’impulsion de Michel Plasson, débutèrent les aménagements actuels en auditorium. Devenue salle très chaleureuse de réputation internationale, la Halle sert de siège à l’ONCT dirigé depuis 10 ans par le très talentueux chef russe Tougan Sokhiev.
Tout d’abord le concerto pour violon de Chostakovitch, musique intimiste, douloureuse, comme une perpétuelle tension s’étirant tout au long des 4 mouvements. Musique peu familière qui a quelque peu dérouté une partie de nos Amis.
Partition difficile, non pas virtuose dans le sens spectaculaire du terme mais complexe en flot quasi continu où il faut exprimer la complexité de l’âme humaine chère au compositeur, âme déchirée et sans cesse partagée, aux mains des "aparatchiks" soviétiques qui n’ont eu de cesse de jouer le chaud et le froid envers le Maitre russe.
Partition magistralement interprétée avec beaucoup de finesse et sensibilité par un jeune violoniste arménien, Sergey Khachatryan, sous la direction du maestro russe, Stanislav Kochanovsky.
Belle ovation chaleureuse du public envers le jeune violoniste, qui nous a gratifié d’un bis émouvant avec une mélopée ancienne arménienne où résonnait doucement la mélancolie de ce peuple secoué par l’histoire.
Ensuite, place au rutilement orchestral impressionnant du Maestro Tchaikovski avec son imposant poème symphonique tiré du récit romantique du héros Manfred. Une heure de chatoiement harmonique et de puissance évocatrice des tutti de l’orchestre au grand complet (près de 90 musiciens) qui emplissait l’auditorium !
Sensation garantie et romantisme russe tourmenté à souhait !
Brillante direction du même chef, S.Kochanovsky, sachant mettre en valeur la grande qualité musicale de l’ONCT !
Là aussi, ovation d’un public très enthousiasmé par la prestation des interprètes !
En résumé, un séjour toulousain réussi sur tous les plans !
Alain GUIPONT
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