La
saison 2017 / 2018 des "Amis de l'Opéra Grenoble" prend son envol à Lyon avec une oeuvre originale.
WAR REQUIEM
BENJAMIN BRITTEN
Texte de la Messe pour les Morts et poèmes de Wilfred Owen,1962.
En latin et en anglais.
DISTRIBUTION
Direction musicale : Daniele Rustioni
Mise en scène : Yoshi Oida
Décors : Tom Schenk
Costumes : Thibault Vancraenenbroeck
Lumières : Lutz Deppe
Chorégraphie : Maxine Braham
Baryton : Lauri Vasar
Ténor : Paul Groves
Soprano : Ekaterina Scherbachenko
Orchestre, Chœurs et Maîtrise de l'Opéra de Lyon
Le plus puissant chef-d’œuvre du compositeur de Mort à Venise et Le Songe d’une nuit d’été reprend vie dans une mise en scène émouvante portée par trois chanteurs d’exception.
Objecteur de conscience, traumatisé par la guerre dont il avait approché l’horreur au plus près, Britten fut un adversaire irréductible de la violence militaire. Pour son Requiem, en geste militant, il réunit trois solistes issus de nations ennemies pendant la Seconde Guerre mondiale, et associe au texte liturgique des poèmes de l’anglais Wilfred Owen, mort dans les derniers jours de la Première Guerre.
En familier de Britten, le metteur en scène japonais Yoshi Oida fait renaître ce War Requiem ; entremêlant les échos de sa propre mémoire aux images des conflits qui ont secoué le monde ces dernières décennies, il en révèle les échos puissamment contemporains.
Les commentaires d'Alain GUIPONT, Président de l'Association des Amis de l'Opéra Grenoble, sur ce spectacle :
Notre saison 2017.2018 des Amis de l’Opéra-Grenoble a débuté ce dimanche 15 octobre 2017, à l’Opéra de Lyon, avec une œuvre inédite et très particulière, hors du répertoire lyrique, à savoir le "War Requiem " de Britten, présenté ici sous forme scénique par les forces artistiques de l’Opéra de Lyon. Peu d’Amis inscrits ! Nous fûmes une petite dizaine de curieux pour aller découvrir ce monument musical du XXème siècle. Grand moment d’émotion !
Britten a composé son requiem pour commémorer la destruction de la Cathédrale de Coventry par l’aviation allemande le 14 novembre 1940, cathédrale jamais reconstruite. Entre 1959 et 1962, année de l’inauguration célébrée par la création du "War Requiem", une nouvelle cathédrale moderne fut érigée tout contre les ruines anciennes laissées en l’état comme témoignage de l’acharnement guerrier. Ce nouvel édifice fut donc le théâtre de la création de cet immense et poignant réquisitoire contre l’absurdité et la barbarie de toutes les guerres. Aucunement question pour Britten de glorifier les hauts faits militaires mais, au contraire, de s’attacher à l’aspect individuel et profondément humain des soldats engagés dans les batailles, quels que soient leurs camps, leurs pays d’origine.
Britten a même tenu à ce qu’au moins trois pays belligérants soient présents dans son œuvre comme un symbole de réconciliation, représentés par les trois solistes : les deux soldats : un ténor britannique, un baryton allemand ; et une civile : une soprano russe. Britten a réservé le chant liturgique de la Messe des Morts à la soprano, en y intercalant les textes des poèmes d’un jeune soldat britannique, Wilfred Owen, chantés par les hommes.
Ce jeune homme d’un extrême courage, engagé volontaire, a été tué, à 25 ans, dans une dernière bataille le 4 novembre 1918, une semaine avant l’Armistice, au bord du canal de la Sambre à Ors dans le Nord. Il a écrit la majeure partie de ses poèmes dans les tranchées, au plus près de la détresse humaine. Textes poignants d’humanité, à la fois tranches de vie militaire au front, réflexions poétiques et philosophiques sur la soif d’agressivité humaine et la douleur infinie qui en découle, sur l’espoir fragile de voir une humanité réconciliée à jamais dans une paix universelle.
L’Opéra de Lyon a demandé au metteur en scène japonais, Yoshi Oida, de monter scéniquement ce "War Requiem".
Dans un vaste décor évoquant un lieu indéterminé où des humains civils vont célébrer les funérailles de leurs soldats tués au front, il a placé un immense chœur mixte, les civils, en fond de scène. Devant, une estrade sur laquelle vont se dérouler plusieurs tableaux : le cérémonial funèbre, la déploration, les dialogues entre les deux soldats, le chant d’espoir final, etc… Décors et costumes évoquant la période de la grande Guerre de 1914/1918.
Scénographie parfaitement adaptée au déroulé des séquences musicales du requiem. Parfaitement théâtrale au point de communiquer aux spectateurs une émotion bouleversante, alliée à une réflexion féconde sur l’humanité.
Ce même public l’a fait savoir par une ovation particulièrement chaleureuse au tomber de rideau !
Côté interprètes : unanimité générale sur la haute qualité musicale et d’interprétation de l’ensemble des artistes présents, fort nombreux ! Un grand orchestre dans la fosse + un orchestre de chambre sur scène + un grand chœur mixte + un chœur d’enfants + un orgue de scène + 3 solistes + 1chef d’orchestre ! Impressionnant !
Sous la direction inspirée et sensible du jeune Maestro Daniele Rustioni, le nouveau chef titulaire de l’Orchestre de l’Opéra de Lyon, la musique de Britten, à la fois puissante et intimiste s’est épanouie au plus profond du cœur et de l’esprit des spectateurs.
Un chœur, et quel chœur, que celui de la maison lyonnaise, impressionnant de puissance, de présence et d’extrême finesse de sonorité ! Avec lui, les jeunes enfants de la Maîtrise de l’Opéra, parfaitement intégrés au discours scénique,
ont exprimé de leurs voix fraîches une sorte de Paradis sur terre, détaché des déchirements guerriers des humains.
La belle soprano russe, Ekaterina Scherbachenko, si lumineuse, a incarné la veuve d’un des soldats tués au front, qui s’avèrera être le poète Wilfrid Owen lui-même, de sa voix chaude et implorante dans le texte liturgique.
Nos deux soldats, à la fois ennemis au front et frères dans la détresse, exprimant la parole poétique d’Owen, furent interprétés avec vitalité et profonde émotion, intériorité sensible, par le ténor Paul Groves et le baryton Lauri Vasar.
Une équipe impeccable de musicalité ! Ainsi qu’une équipe technique sur scène impeccable elle aussi de professionnalisme !
La public a reconnu ces qualités remarquables et les a saluées par une chaude et longue ovation.
D’autant que le média allemand OpernWelt, rassemblant une cinquantaine d’organes de la presse musicale, a décerné à la maison lyrique de Lyon le titre envié de « Meilleur Opéra 2017 en Europe » ! Reconnaissance amplement méritée ! Et la première fois à être décernée à une maison française. Bravissimo à eux tous !
Alain GUIPONT
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